
Une chimie plus verte
pour la récupération du lithium
La récupération d’un sel de lithium de haute pureté à faible coût économique et environnemental est un des enjeux du recyclage des batteries lithium-ion. Cette publication scientifique de l’axe Batteries du PEPR étudie la combinaison d’une chimie verte à base d’acide citrique et de l’électrodialyse, comme procédé prometteur permettant notamment de valoriser les autres métaux contenus dans les batteries NMC.
Par Soukayna Badre-Eddine (GeoRessources, LRPG), Laurence Muhr (LRPG) et Alexandre Chagnes (GeoRessources)
Les batteries lithium-ion sont au cœur des transitions énergétique et numérique, ainsi que de la mobilité électrique. On les retrouve dans de nombreuses technologies de notre quotidien : téléphones, ordinateurs et véhicules électriques. Pourtant, leur recyclage demeure un défi majeur. Les procédés actuels doivent être améliorés pour gagner en performance, réduire les coûts et limiter leur impact environnemental. En particulier, il est essentiel de minimiser les pertes de lithium tout au long du procédé et de produire un sel de lithium de haute pureté, réutilisable pour la fabrication de nouvelles batteries.
L’intégration de nouvelles technologies dans les procédés de recyclage des batteries lithium-ion apparaît donc indispensable. L’électrodialyse, une technique de séparation utilisant un champ électrique et des membranes pour trier les ions, offre une alternative prometteuse. Cette étude propose une approche innovante combinant la lixiviation à l’acide citrique, un acide faible et biodégradable, et l’électrodialyse, afin d’extraire sélectivement le lithium tout en valorisant le nickel, le manganèse et le cobalt contenus dans les matériaux de cathodes de type NMC (nickel-manganèse-cobalt).
Des résultats encourageants
Le matériau de batterie NMC a d’abord été dissous dans une solution d’acide citrique et de peroxyde d’hydrogène, sous des conditions optimisées (45 °C, 5 h, pH 5). Ce mélange a permis de dissoudre près de 90 % des métaux, dont 93 % du lithium.
Après la lixiviation, une partie des métaux de transition a précipité naturellement sous forme de sels métalliques valorisables, tandis que le lithium est resté majoritairement en solution. Les conditions choisies permettent également de limiter le risque de colmatage des membranes lors de l’électrodialyse, tout en produisant des espèces chimiques suffisamment distinctes pour faciliter leur séparation. La solution enrichie en lithium a ensuite été traitée par électrodialyse à l’aide de membranes hautement sélectives, permettant d’accroître la pureté du lithium en éliminant les traces résiduelles de nickel, de manganèse et de cobalt.

Au bout de deux heures, le lithium a été concentré près de dix fois dans la solution finale, avec une efficacité de transfert supérieure à 70 %. Aucun colmatage des membranes n’a été observé, confirmant la compatibilité du procédé et la stabilité du milieu à base d’acide citrique. Ces résultats démontrent qu’il est possible de récupérer sélectivement le lithium dès les premières étapes du recyclage, tout en valorisant les autres métaux, grâce à la combinaison d’une chimie verte à base d’acide citrique et de l’électrodialyse.
Ces résultats démontrent qu’il est possible de récupérer sélectivement le lithium dès les premières étapes du recyclage, tout en valorisant les autres métaux […]
À plus long terme, cette méthode pourrait être intégrée à des chaînes de recyclage complètes, permettant de valoriser à la fois le lithium et les autres métaux contenus dans les batteries. Elle ouvre aussi la voie à un modèle d’économie circulaire, où les matériaux des batteries usagées deviennent la ressource des batteries de demain. Les prochaines étapes consisteront à améliorer l’étape de coprécipitation du cobalt, du nickel et de manganèse afin de produire un précurseur de cathode pouvant être utilisé pour produire des électrodes positives pour les batteries lithium-ion.
Badre-Eddine, S.; Muhr, L.; Chagnes, A. Innovative Integration of Citric Acid Leaching and Electrodialysis for Selective Lithium Recovery from NMC Cathode Material. Metals 2025, 15, 598. https://doi.org/10.3390/met15060598
Ces travaux réalisés dans les laboratoires GeoRessources et LRGP (UMR CNRS de l’Université de Lorraine) sont financés par l’axe Batteries LULABAT du PEPR Recyclage. Les travaux ont été menés dans le cadre de la thèse de Madame Soukayna Badre-Eddine sous la direction du Prof. Laurence Muhr et du Prof. Alexandre Chagnes.

Soukayna Badre-Eddine
Doctorante en troisième année en Génie des Procédés au sein des laboratoires Réactions et Génie des Procédés (LRGP) et GeoRessources de l’Université de Lorraine. Mes travaux portent sur l’intégration de procédés électromembranaires pour le recyclage, par voie hydrométallurgique, des matériaux cathodiques usagés des batteries lithium-ion.
Alexandre Chagnes
Depuis 2016, Alexandre Chagnes occupe le poste de professeur des Universités à l’Université de Lorraine. Fondateur et directeur du réseau national d’hydrométallurgie (Promethée) jusqu’en 2020 et directeur des partenariats industriels à l’École Nationale Supérieure de Géologie (Nancy, France) de 2018 à 2022, il a également été directeur scientifique du LabEx RESSOURCES21 de 2016 à 2024. Actuellement, A.Chagnes dirige le Programme de recherche sur l’économie circulaire pour les transitions énergétique et numérique à l’Université de Lorraine (CIRSET).
Ses recherches portent sur la compréhension fondamentale des processus physico‑chimiques impliqués dans la récupération des métaux à partir de ressources primaires et secondaires, afin de créer de nouveaux procédés ou d’améliorer ceux existants.


Laurence Muhr
Laurence Muhr est, depuis 2013, de Professeure des Universités (Université de Lorraine) à l’ENSIC. Elle exerce ses activités de recherche au sein du Laboratoire Réactions et Génie des Procédés (LRGP) où elle assure la responsabilité de l’axe PERSEVAL, Procédés pour l’EnviRonnement, la SEcurité et la VALorisation des ressources.
Ses travaux de recherche portent sur des procédés séparatifs en phase liquide : échange d’ions, procédés hybrides échange d’ions/procédés électro-membranaires/procédés membranaires, procédés de chromatographie multi-colonnes couplés à d’autres opérations unitaires. Les applications étudiées concernent plus spécifiquement la purification de molécules pour les industries des sciences de la vie et l’hydrométallurgie.
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